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lundi 29 janvier 2024

Défendre l’Etat de droit

La décision du Conseil Constitutionnel rendue jeudi dernier sur la loi immigration est loin d’avoir résolu les problèmes posés. Le Gouvernement a beau se « réjouir » que les dispositions qu’il a, lui, proposées n’ont pas été déclarées anticonstitutionnelles, les conditions et la forme du débat que la France a connu depuis quelques semaines ont créé un climat lourd de conséquences.

De tous temps, aussi loin que l’on remonte dans le passé, les sociétés ont connu des mouvements migratoires plus ou moins importants. La volonté de conquête territoriale les a motivés à un certain moment de l’histoire de l’humanité. Des raisons économiques les ont suscités, soit parce que le capitalisme recherchait une main d’œuvre à bas coût, soit parce que les immigrés eux-mêmes pensaient trouver les conditions nécessaires à leur survie. Aujourd’hui, les conditions climatiques qui rendent très difficiles dans certains pays les possibilités de vie encouragent au départ. C’est dire que l’immigration dans les pays comme le nôtre ne s’arrêtera pas. Il est donc indispensable que soient définies des mesures de contrôle de ces flux migratoires.

La Droite et l’extrême-droite surfent sur les réactions xénophobes et racistes d’une partie de l’opinion qui fait de l’étranger le bouc-émissaire de leurs difficultés du moment. 

La Gauche s’arc-boute sur les valeurs de solidarité, d’égalité, de liberté qui sont les siennes, et c’est tant mieux. Elle n’est pas assez imaginative pour proposer une politique cohérente en ce domaine. Désormais, cette question ne peut pas être traitée à l’échelle d’un seul pays. L’Union Européenne a un rôle déterminant à jouer en liaison avec les pays dont sont originaires les migrants.

Cependant, un problème beaucoup plus préoccupant est apparu à l’occasion de ce débat, celui du fonctionnement de nos institutions et le respect des règles de droit qui les caractérisent. Plusieurs de nos principes fondamentaux qui font l’originalité en même temps que la force de notre Démocratie et de la République ont été bafoués tant par le Gouvernement lui-même que par la Droite prétendue « républicaine » et par l’extrême-droite qui ne rêve que d’installer un pouvoir autoritaire en France, privatif de libertés fondamentales. C’est ce que le Conseil Constitutionnel, en s’appuyant sur la forme, celle des « cavaliers », a évité qu’on retrouve dans une loi française des dispositions inacceptables dans le pays des Droits de l’Homme.

Plus grave encore sont les réactions dénonçant le « pouvoir des juges ». « Défendre l’Etat de droit est la valeur suprême de la Démocratie » pouvait-on lire dans l’éditorial du journal Le Monde du 27 janvier. Or, les propos tenus par le parti LR et par l’extrême-droite à cet égard ne peuvent qu’inquiéter fortement. La « désinvolture » du Chef de l’Etat s’en remettant au Conseil Constitutionnel pour annuler ce qu’il ne voulait pas dans la loi alors qu’il aurait suffi de voter contre au Parlement interpelle également sur le fonctionnement de nos institutions.

En 1792, les révolutionnaires déclaraient la République en danger. Soyons conscients qu’elle est aujourd’hui menacée dans ses fondements.