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jeudi 14 mai 2020

Un vœu pieux ?

« Arrêtons de nous foutre sur la gueule ». C’est par cette formule choc que Laurent BERGER, secrétaire général de la CFDT, concluait hier matin une interview à la radio. Il est évident qu’on ne peut que souscrire à cet objectif, surtout s’il concerne des actes physiques.

Dans la bouche du responsable syndical, ces mots faisaient allusion aux affrontements verbaux qui interviennent dans la vie, qu’elle soit politique, syndicale, sociale. Il s’agit de rechercher un compromis, suite à un échange d’arguments contradictoires, qui amène les parties à s’entendre sur un sujet donné.

Je l’ai dit : la recherche d’un accord, à partir de thèses différentes, est toujours la meilleure formule. Cela peut créer des insatisfactions. Cela ne met pas forcément fin au débat qui pourra continuer après la mise en œuvre de l’accord. Cela n’entraîne pas non plus un reniement de la part de l’un ou de l’autre des interlocuteurs. Je citerai à nouveau Jean JAURES : « aller à l’idéal mais prendre en compte la réalité ».

Néanmoins, cette recherche de compromis n’a de sens que si elle est menée dans la plus grande transparence et sans arrière-pensée. Dans le domaine politique, c’est particulièrement difficile à réaliser. C’est la conséquence naturelle de l’attachement que chacun doit avoir à des valeurs qui ne sont pas partagées unanimement.

Prenons l’exemple de la justice sociale. Pour la Gauche, c’est un objectif permanent, jamais atteint pleinement, malgré des avancées au fil des décennies et depuis deux siècles. Pour les libéraux, la priorité est à l’économie, aux profits qu’elle engendre. Ce n’est qu’après la « rémunération du capital » que l’on peut envisager une redistribution en direction des salariés.

Quand Monsieur MACRON vante les qualités des « premiers de cordées » qui vont permettre le « ruissellement » de l’argent pour atteindre les « premiers de corvée », il démontre à l’évidence son attachement au libéralisme plutôt qu’à la justice sociale.

Faudrait-il donc ne pas critiquer cette position sous prétexte d’éviter l’affrontement plus ou moins violent évoqué par Laurent BERGER ? Sûrement pas.

Dans le contexte qui découle de la crise sanitaire, du confinement qui s’en est suivi, de la reprise progressive des activités depuis quelques jours, le Parti Socialiste propose des mesures sociales d’urgence, demande qu’on ne précarise pas les chômeurs, suggère de faire de l’aide alimentaire une priorité, avance des dispositions pour les loyers et les charges.

Ce sont 16 propositions, rien qu’en matière de lutte contre les inégalités, qui sont ainsi formulées. Le Gouvernement est-il prêt à engager la discussion, sereinement, sans diatribe ? S’il le faisait, il répondrait à l’appel du PS d’instaurer un état d’urgence sociale et il satisferait Laurent BERGER.

Jusqu’alors, et depuis trois ans d’exercice du pouvoir, le Chef de l’Etat et ceux qui le soutiennent ont davantage manifesté leur mépris vis-à-vis de « l’ancien monde ». Le COVID-19 les aura-il fait changer ? Nous le saurons dans les semaines à venir.